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Le moniteur automobile, n° 1236 du 26/04/01

mercredi 10 novembre 2004, par Aurelien

Pour nous replonger dans l’ambiance de l’époque, revenons brièvement sur les événements qui ont marqué l’année 1976. Il fait exceptionnellement chaud cet été-là, le Concorde effectue son premier vol commercial et Björn Borg remporte son premier Wimbledon. Lucien Van Impe gagne le Tour de France devant un autre Belge, Freddy Maertens. Aux Jeux Olympiques de Montréal, Ivo Van Damme est dans la forme de sa vie et Nadia Comaneci décroche trois médailles d’or et une de bronze en gymnastique. James Hunt est champion du monde de formule 1 sur une McLaren, Jacky Ickx, associé à Gijs van Lennep, triomphe aux 24 Heures du Mans au volant d’une Porsche et... la Volkswagen Golf GTI est commercialisée.

Prenez au hasard un athlète qui était au meilleur de sa forme en 1976. Retrouvez-le 25 ans plus tard : il y a de grandes chances qu’il ne soit pas encore tout à fait dépassé aujourd’hui, même s’il aura sans doute pris quelques kilos. Et il n’aura sans doute pas perdu grand-chose de son charisme. Mieux : il aura mûri et sera indéniablement devenu une personnalité en vue dans son domaine. C’est très précisément ce qui est arrivé à la VW Golf GTI. Au fil des ans, la GTI a mûri, mais elle s’est aussi assagie. A son irrépressible envie de vaincre de l’époque a succédé le goût de la performance mesurée. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire l’essai comparatif publié par ailleurs. Quant à nous, nous sommes remontés dans le temps, il y a 25 ans, pour reprendre le volant d’une athlète qui était alors au meilleur de sa forme et s’apprêtait à démontrer au monde entier l’étendue de son talent. Nous avons pu mettre la main sur une Golf GTI gris métallisé de la première génération, soit la GTI originelle animée par un 1600 et dotée de la boîte manuelle à 4 rapports. Celle qui avait les petits feux arrière et les petits pare-chocs métalliques.

Sans fioritures

Le projet 337, destiné à définir la succession de la Coccinelle, démarra déjà en 1970. Il s’agissait de concevoir une "Cox" moderne qui soit à la fois sobre, fiable, peu onéreuse à l’usage et surtout discrète. Sans craindre d’être irrespectueux, on peut affirmer que Volkswagen a développé un véhicule sage, sans doute même un peu terne. Ses concepteurs s’étaient concentrés sur le public de la Coccinelle et celui-ci n’aimait guère les fioritures. Quelle ne fut donc pas la surprise de la direction de VW d’apprendre en 1973 qu’il était question de concevoir une version sportive de la Golf. L’idée fut dans un premier temps rejetée, certains estimant qu’une puissance d’environ 50 ch faisait l’affaire. Ceux-là jugeaient l’idée de développer une version de 70 ch largement suffisante. C’était même déjà un peu trop. D’autant qu’avec la Scirocco, il existait une variante coupé de la Golf qui avait été lancée quasi à la même époque. C’était compter sans l’obstination de l’ingénieur de développement Löwenberg. Transfuge d’Opel, il réunissait quelques collaborateurs de la maison durant ses temps libres pour définir sa propre interprétation de la Golf. Il rêvait d’une alternative à ce que proposaient déjà Opel et Ford, qui faisaient à l’époque référence dans le domaine des petites sportives avec la Kadett GT/E et l’Escort 2000 RS. Ses seuls arguments ne suffirent pourtant pas à convaincre le directoire de Volkswagen. Il changea donc son fusil d’épaule et tenta de convaincre la direction avec l’argument suivant : le développement d’une version sportive de la Golf profiterait au raffinement des versions plus sages. On parviendrait ainsi, selon Löwenberg, à travailler plus rapidement, donc à moindre coût. Il obtint l’accord de Fiala, responsable du développement, et ensuite celui du patron de VW, Schmücker. Löwenberg se vit donc accorder le feu vert pour construire "sa" Golf sportive. C’est chez Audi qu’il dégotta le moteur idéal, un 1600 à injection mécanique Bosch K-Jetronic. Ses 110 ch animaient déjà le haut de gamme de l’Audi 80, la GTE.

Les doutes subsistent

Löwenberg, qui avait, quelques années auparavant, pris part à quelques rallyes au volant d’Opel Kadett préparées par ses soins, décida de concevoir une GTI rigoureusement sportive, sans compromis. Schmücker, le patron de VW, restait dubitatif. Jusqu’à ce que la suspension de la GTI soit prise en main par un sorcier en la matière, M. Schuster. Il venait de chez Audi, où il avait contribué au développement des 50 et 80, s’illustrant dans le compromis entre comportement et confort. Il appliqua les mêmes recettes à la Golf GTI. Schuster opta pour des amortisseurs fermes associés à des ressorts relativement souples (la seule solution cohérente). Une barre antiroulis à l’avant et à l’arrière et un train arrière renforcé dotèrent la Golf d’un certain confort, mais aussi et surtout d’un comportement très sûr. Les gens du marketing n’étaient malgré tout pas encore totalement convaincus. Qui s’intéressait à une petite familiale capable d’accrocher 185 km/h ? Après moult tergiversations, la décision fut prise à l’été 1976 de construire 5.000 exemplaires de la Golf GTI (et pas un de plus) afin d’autoriser une homologation de la voiture en groupe 1. La Golf GTI connut naturellement quelques maladies de jeunesse. Les démarrages à chaud, par exemple, n’étaient pas son fort. En outre, les moteurs ne parvenaient pas à atteindre systématiquement les 110 ch annoncés. VW avait promis une vitesse de pointe de 185 km/h, mais la GTI n’avait pas toujours la puissance requise pour remplir cette partie du contrat. Chez VW, on imagina une parade en dotant la Golf d’un énorme spoiler noir mat sous le pare-chocs avant afin d’améliorer l’aérodynamique de la voiture et de dépasser ainsi la barrière mythique des 180 km/h. Ce spoiler avant noir allait devenir l’une des caractéristiques esthétiques de la Golf GTI, avec les élargisseurs d’ailes noirs, les bandes décoratives sur les flancs et, naturellement, l’encadrement rouge vif de la calandre. L’habitacle reçut des sièges baquets tendu d’un tissu à carreaux un volant sport et une console centrale reprenant une montre et un thermomètre d’huile. La touche finale était constituée par la fameuse balle de golf en guise de pommeau de levier de vitesse.

La référence

Cette petite balle de golf peut d’ailleurs être considérée comme le symbole du manque de flair du département marketing, qui n’accepta qu’à contrecœur de commercialiser la GTI. A l’époque, il manqua carrément son t-shot. Car, très rapidement, celle qu’il considérait comme le vilain petit canard de la gamme se révéla un incroyable succès commercial. Mieux : elle se révéla comme un concept à part entière, elle créa une mode nouvelle. Volkswagen n’aurait pu imaginer plus belle carte de visite. La connotation positive qu’amena le sigle GTI valut son pesant d’or. Car VW s’était mis dans le rouge en développant la nouvelle Golf. Et soudain, la GTI se vendait comme des petits pains. Elle annonçait le vent nouveau qui allait souffler sur la vénérable maison de Wolfsburg. Un vent qui donnerait naissance à un phénomène plus marquant encore : la première petite berline à gazole réellement moderne : la Golf Diesel. Tout penauds, Ford et Opel furent contraints d’assister sans pouvoir réellement réagir au détournement d’une bonne partie de leur clientèle attitrée, séduite par la Golf GTI. Si leurs Ford Escort 2000 RS et Kadett GTE continuaient à faire le spectacle du fait de leur architecture de propulsion, elles ne furent plus en mesure, tant sur le papier qu’en pratique, de concurrencer la GTI " traction avant" en efficacité. Et leurs tentatives respectives d’offrir une alternative valable ne furent jamais réellement convaincantes, laissant ainsi la voie libre à une Golf GTI qui allait rester la référence absolue durant de longues années. La Golf GTI de la première génération changera très peu au cours d’une carrière qui s’étalera de 1976 à 1983. Fin 1978, elle s’offrira, comme toutes les Golf, d’ailleurs, des boucliers en composite. Au milieu de 1979, la GTI s’offrira une boite de vitesses à 5 rapports et l’habitacle sera redessiné un an plus tard, avec l’adoption des feux arrière de plus grandes dimensions. Un 1800 cm3 de 112 ch succédera au 1600 en 1982. La Golf II fera ses débuts un an seulement plus tard. Entre juin 1976 et août 1983, non moins de 461.690 exemplaires de la Golf GTI sortiront des chaînes. Et dire que le marketing se demandait comment il ferait pour en vendre 5.000... Pourtant, il ne nous a pas été facile de trouver un exemplaire adéquat pour réaliser ce reportage. Quand avez-vous aperçu une Golf GTI, première génération, pour la dernière fois ? Nous désespérions d’en trouver une lorsque le service de presse de Volkswagen en Belgique nous proposa ce superbe exemplaire gris métallisé. Une voiture acquise en 1990 par la D’Ieteren Gallery pour une bouchée de pain. Malgré ses 214.000 km au compteur, elle se trouvait dans un état exceptionnel. Elle avait fort heureusement échappé au sort de bon nombre de ses congénères : jantes en alliage trop larges pour elle, greffe de monstrueux baffles dans les ailes ou abaissement exagéré des suspensions. Elle reçut un petit coup de frais dans la maison (pas besoin, toutefois, d’une restauration traditionnelle) et trône depuis dans la D’Ieteren Gallery, cette remarquable collection réunie par l’importateur belge.

La grande classe

Après une petite escapade sur le circuit routier de Chimay, on peut sans doute se demander pourquoi cette petite familiale a ainsi révolutionné son époque. Elle était certes performante. Mais un temps de 9 s sur le 0 à 100 km/h et une vitesse de pointe de 180 km/h n’étaient pas réellement extraordinaires. Il manquait aussi sans doute un rapport à la boite 4. Les sièges offraient un maintien agréable et sportif et la position de conduite ne méritait aucune critique. La planche de bord, en revanche, reste très plastique et la console additionnelle semble tout droit sortie d’un magasin d’accessoires. Et qu’en est-il de son comportement ? Agréablement sportif lui aussi, sans être réellement inconfortable, et ne méritant guère de remarque particulière. Lorsqu’on la brutalise un peu en courbe, cette golf lève bien évidemment la patte (la roue arrière intérieure se déleste), mais il s’agissait là d’une attitude spectaculaire sans aucun danger et qui devint rapidement la marque de fabrique de cette petite sportive. Qu’est-ce qui rendait donc la première GTI si spéciale ? Indéniablement le fait que, 25 ans plus tard, elle n’a toujours pas à rougir de la comparaison avec quelques familiales compactes d’aujourd’hui, prouve sa grande classe. Ses ardents passionnés de la première heure regrettent sans aucun doute sa vivacité, sa pétulance, son agilité aujourd’hui sacrifiées. Mais les acheteurs de la GTI originelle ont également pris de la bouteille et se sont sans doute assagis. ils doivent aujourd’hui friser la cinquantaine...

Jan Bové


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